« Tanguy, le retour »

Six mois sans article sur ce blog. Et là je reviens, en pleine forme, motivé par le film que je viens de voir à prendre le clavier. Motivé par la tristesse. Motivé par l’énervement. Désolé, je reviens pour critiquer.

 

J’aime bien le premier Tanguy. Les comédiens cabotinent — Dussolier en tête — et la réalisation est sympathique, avec beaucoup de plans très longs, plus complexes que le classique champs / contre-champs. C’est plaisant à regarder.

Alors j’ai été voir sa suite assez confiant.

LOL.

Dès le départ, le film se traine. Les acteurs confirmés jouent comme au théâtre en matinée, au point que je puisse me demander, à ma séance de treize heures, si les cinémas ne disposent pas d’une autre copie plus dynamique pour la séance de vingt-et-une heure. Sabine Azéma et André Dussollier en font le minimum, pendant qu’Éric Berger ne sait pas comment jouer la dépression. 

Cerise sur le gâteau, la fille adolescente de Tanguy. Il ne serait pas poli de dire qu’elle joue comme un pied. D’ailleurs ce ne serait pas exact non-plus. Non, elle ne joue pas, elle récite. C’est officiel, la direction d’acteur est totalement absente de ce Tanguy 2.

« Ah non, ce soir c’est Black Mirror ! »

Les séquences avec amis du couple, qu’on verra presque toujours dans les mêmes décors d’un terrain de golf et du club-house attenant, sont malaisantes de fausseté, voulant faire croire à des discussions de quinqua-sexa-génaires fans de séries télés. Mais les entendre parler des séries dont ils se disent accros est déprimant. On dirait une parodie, un sketch du SNL sur le binge-watching. Chatiliez n’aime pas les séries et ça se ressent.

Moi et ma gow devant la saison 47 de « The Affair ».

Je ne me souviens pas si le premier Tanguy montrait la profession des parents, mais ici Dussollier n’a plus comme seule occupation professionnelle que les rares réunions du conseil d’administration de son entreprise. Ils ont encore déménagé et sont passé du chouette petit appartement avec vue imprenable sur Paris du premier film à un immense appartement ultra-moderne pas franchement réaliste et plutôt étouffant avec ses fenêtres qui n’offrent qu’une vue trop rare et très floue sur l’extérieur. Aller, un bon point pour la baie vitrée entre la cuisine et le salon, clin d’œil probable au premier film. Mais la topologie de cette appartement — qui semble être un décor de cinéma bancal et non un vrai logement loué — rappelle plus une adaptation de pièce de théâtre mal inspirée qu’un vrai appartement.

Des vieux, des vieux, des vieux. « Tanguy 2 », le « Cocoon » français.

 

Donc voila, on regarde des gens qui jouent en demi-teinte, déambulant dans des décors de richards. Mais si au moins l’esprit de Tanguy premier du nom était là.

Que nenni.

Le film est d’une effroyable lenteur et d’un incommensurable ennui. L’introduction n’en fini pas : sur 1h30 de film, il faut en effet 45 minutes pour que les parents réalisent que Tanguy risque de rester et (re)décident de le foutre à la porte. Avant cela, on assiste, en spectateur désarmé, à une suite de petits-déjeuners polis, de discussions de vieux au golf, et de blague récurrente sur la prostate ! Ah oui, tout dans ce film sonne vieux, vraiment ! Vous aurez aussi droit à Sabine Azéma faisant de la gym avec son entraineur à domicile beau gosse, à deux reprises, sans que ceci n’aboutisse au moindre gag, à la moindre infidélité, ou à quoi que ce soit d’autre. 

Sabine Azéma dans "Tanguy le retour", faisant sa gym avec son prof de sport dans une séquence totalement inutile de "Tanguy 2".

Regardez cette photo pendant une minute. Voila, vous aurez vu cet acteur (Julien Manicon) plus longtemps qu’il n’apparait dans le film. C’est aussi l’un des rares plans montrant l’extérieur à travers les fenêtres.

Le tout parsemé de-ci, de-là, des commentaires d’une des amies du couple, qui expliquera aux autres amis ce que le spectateur sait déjà : « il ne va pas partir », « ça va chier », sur un ton qui se croit drôle — et attention peut-être l’est-il pour les plus de soixante ans et je ne peux juste pas comprendre. Mais moi, elle m’a semblé sortir ses répliques écrites par un auteur de cinéma comme une actrice de doublage dans mauvaise pub télé pour des plats cuisinés.

À la moitié du métrage, personne n’avait encore ri dans la salle. C’était facile à entendre, la salle était petite et nous étions dix (enfin, neuf, quand une personne est partie). Mais enfin les parents décident de déclarer la guerre à Tanguy, et le temps de quelques redites des pièges du premier film, on croit que ça va décoller. 

Peine perdue, des rebondissements plus improbables ou pathos les uns que les autres — mais que je me retiendrai de vous spoiler par politesse (et l’envie de ne pas trop y repenser) — vont à nouveau plonger Azéma et Dussolier dans la déprime et le film ne tentera toujours pas de nous faire rire, jusqu’au générique de fin qui arrive sans crier gare, alors que le film n’offre aucune conclusion. Un générique qui, comme pour enfoncer le clou dans la plaie, comme fidèle au reste de l’œuvre, comporte ce remerciement : « Etienne Chatiliez remercie […] tous les comédiens pour leur justesse. »

 

Tanguy, le retour n’est pas une comédie. C’est un drame social et vu comme ça il pourrait presque se tenir. 

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